*La question du juste prix est épineuse et relativement taboue en France. Comment évaluer le juste prix? A l’aune de quels critères : le temps passé ? Les compétences supposées ou réelles ? L’engagement ? Les résultats ? L’expérience ? Selon les possibilités de chacun ?
Première réponse de bon sens : la nécessité de vivre de son métier, une fois les frais fixes et les cotisations sociales payées, combien d’argent doit me revenir pour rémunérer mon travail?
On entend souvent qu’un prix trop bas dévalorise le travail effectué avec souvent l’idée sous-jacente que « plus c’est cher, plus c’est qualitatif » et inversement bien sûr.
Pourtant, le système de sécurité sociale en France permet à chacun.e d’entre nous d’accéder à des soins de qualité sans verser, ou presque, d’argent. Ce système social d’entraide mutuelle, de reconnaissance de notre « vulnérabilité mutuelle », si l’on prend le lexique des éthiques du care, a cependant un effet pervers, invisible qui est que nous sommes peu capables d’estimer le prix des soins reçus, et souvent aussi, que nous prenons comme un dû leur qualité, le temps passé des soignants, leur disponibilité, etc. Si nous regardons du côté de leur rémunération, la plupart du temps famélique, le tableau s’assombrit encore davantage.
Mais nous partageons aussi un jugement moral selon lequel les métiers du soin ( au sens large de soins médicaux et para-médicaux et psycho-sociaux) sont des métiers de (com)passion et s’apparente davantage au don (de soi aux autres). L’aspect financier est balayé, invisibilisé par ce postulat moral. Ça arrange tout le monde, et les soignants sont mal payés.

Je ne travaille pas dans le domaine du soin, aussi j’ai la liberté de fixer mes tarifs. Pour autant, je m’inscris en plein dans les métiers de l’accompagnement et du « care » (terme que l’on ne traduit pas en français car très polysémique dans sa langue d’origine. On utilise cependant les traductions suivantes : « attention à l’autre », « sollicitude », « accompagnement », « souci de l’autre », etc) et je me sens pleinement concernée par cette question éthique : quel prix je fixe pour le mieux-être des personnes qui me sollicite?
Alors, voilà ce que je mets dans la balance du tarif que j’ai fixé: le temps passé pour chaque personne le jour de la consultation et lors du suivi, mon implication dans les formations que je réalise régulièrement, mes lectures, mon développement personnel. Je considère que cet investissement quotidien nourrit mon savoir-faire et mon avoir-être. Mon métier est de transformer ces outils des savoirs intellectuels et techniques en qualité de présence, d’attention, de toucher.